Le petit joueur d’échecs de Yoko Ogawa

liv-8539-le-petit-joueur-d-echecsPourquoi ce livre ?

Après mes études de Lettres Modernes à l’université, je ne savais pas quoi faire de ma vie. J’ai donc entrepris des études de japonais, comme ma colocataire et mon amoureux. Mes études m’ont  amenées à m’intéresser à la littérature japonaise qui était alors assez méconnue en France (ce qui n’est plus le cas grâce à Murakami). J’ai découvert une littérature complétement différente de celle de l’occident. A la fois poétique, crue, imaginative ou ancrée dans le réel. En fait, fascinante ! Je ne me lasse donc pas de lire des romans japonais. Yoko Ogawa est l’une de mes auteurs préférés.

      Résumé

Un garçon nait les lèvres scellées. Une petite opération lui permet d’ouvrir la bouche mais le laisse avec un duvet sur les lèvres. Il vit avec ses grands-parents et son petit frère. C’est un petit garçon très fantasque qui vit dans son propre monde. Ses amis sont une éléphante morte sur un toit de grand magasin et une petite fille supposément enfermée entre deux murs. Ce petit garçon est très choyé par sa famille. Sa grand-mère est particulièrement attentive à ses petits-fils. Un jour, alors qu’il arrive à l’école, il trouve le corps d’un homme mort dans la piscine. Ce corps le hante et il veut savoir d’où venait le noyé. C’est pendant ses recherches qu’il fait la rencontre de sa vie : un maître des échecs qui va lui enseigner ce jeu. Petit à petit, le jeune garçon va apprendre à aimer le jeu, le maître et le petit chat « pion » qui l’accompagne pendant son apprentissage. Il va également se rendre compte qu’il est plus facile de jouer sous l’échiquier, loin du regard de l’adversaire. Cette position va lui permettre de ressentir les pions et de les écouter. Sa vie va alors entièrement tourner autour des échecs.

Ce livre est un roman initiatique. Nous suivons l’évolution du jeune garçon à travers les échecs et comment ce jeu le fait grandir, accepter les malheurs et avancer dans la vie. C’est également un livre très poétique. Pas besoin de savoir jouer aux échecs pour pouvoir lire ce roman. D’abord car le jeu est expliqué au début du livre en même temps qu’il est expliqué au petit joueur d’échecs et ensuite parce que les parties ne sont pas retranscrites à la lettre. Elle sont sublimées par le ressenti du petit joueur ou de son adversaire. Et c’est là que la poésie opère. Le fou, le cavalier ou le roi ne sont plus de simples pions du jeu. Pour les déplacer il faut ressentir ce qui est le mieux pour eux. Ainsi, le caractère et la personnalité de chaque joueur peut se lire dans sa façon de jouer. Ces passages descriptifs ne sont du coup, pas du tout ennuyeux, au contraire !

Le roman est composé de trois parties distinctes qui correspondent aux trois moments clés de la vie du jeune garçon. Cela permet astucieusement à l’auteur de montrer l’évolution de son personnage. On le voit grandir et s’épanouir. Et comme dans tout roman d’initiation, on peu dire qu’il lui en arrive des aventures à ce garçon ! A peine un événement vient de se terminer, on se dit que le garçon va enfin pouvoir respirer et BAM, quelque chose d’autre lui arrive ! Pas le temps de s’ennuyer donc.

On s’attache terriblement à ce garçon qui dans mon souvenir n’a pas de nom. Le narrateur nous fait partager ses émotions, son ressenti et ses pensées. On éprouve beaucoup d’empathie à son égard. On est également très touché par son malaise : il a l’impression toute sa vie durant que ses lèvres n’auraient jamais dues être dessoudées. Il ne parle quasiment jamais et supporte difficilement le bavardage des autres. On est soulagé quand il trouve enfin les échecs et donc, un sens à sa vie. Les personnages de la famille du garçon m’ont également beaucoup touchés. La grand-mère aimante et fière de ses petits-fils, le grand père pas bavard mais toujours prêt à aider et le petit frère très attachant.

Au final, ce livre donne l’impression d’être un conte. Un conte très poétique. On ne peut que ressortir charmé par cette lecture et par la plume magnifique de Yoko Ogawa !

Extraits

« Il y voyait beaucoup mieux quand il n’avait pas les pièces devant lui. La mélodie jouée sur l’échiquier à l’intérieur de sa tête était beaucoup plus subtile« 

 » Son silence n’était pas une menace ni une manière de se montrer fort. C’était plutôt tout simplement pour s’effacer.
– Cela est en relation avec le fait d’être fort ou faible aux échecs ?
– Bien sûr que oui. Les échecs sont un jeu où chacun doit absolument déplacer une pièce. On ne peut pas passer son tour. Et même si ce n’est qu’un pion sur une seule case, les pièces bougent sur l’échiquier. Néanmoins, il faut pouvoir rester calme, on ne peut y arriver que si on est fort.
– Il était si fort que ça ? Je croyais que c’était simplement un vieux grand-père bavard.
– Mais pas du tout. C’était un joueur d’échecs remarquable, persuadé que l’on devait s’approcher au plus près de la vérité. C’est pourquoi il s’est débarrassé de son moi pour plonge dans l’océan des échecs.  »

Emily

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